Individualisation assistée par une équipe
Appellation en anglais
Team assisted individualisation (TAI)
Résumé introductif
L’individualisation assistée par une équipe est une stratégie de type macrostratégie qui combine la stratégie d’apprentissage coopératif et l’enseignement individualisé. Étant donné que l’objectif est la maîtrise d’une matière spécifique, il s’agit principalement d’une méthode d’apprentissage structurée en équipes plutôt qu’une méthode d’apprentissage informel en groupes.
Selon Slavin (2010), cette stratégie est conçue spécifiquement pour l’enseignement des mathématiques à des élèves de la 3e à la 6e année, ou à des élèves plus âgés qui ne sont pas encore tout à fait aptes à suivre un véritable cours d’algèbre.
Ce processus d’apprentissage est très pertinent pour intégrer dans une classe des apprenants hétérogènes (débutants, intermédiaires et novices).
Conçue par Robert Edward Slavin, cette stratégie intègre à la fois :
- les responsabilités individuelles de l’apprenant en le mettant dans l’action et en lui permettant d’apprendre à son rythme,
- des récompenses d’équipe qui stimulent la motivation de l’apprenant qui l’invite à coopérer et à aider ses coéquipiers,
- l’individualisation du formateur qui personnalise l’apprentissage.
Stratégies apparentées
C’est une stratégie d’apprentissage coopératif ainsi qu’une méthode d’apprentissage structurée en équipes comme ces cinq autres stratégies:
Tournoi en jeux d’équipes (TGT)
Co-operative Integrated Reading and Composition (CIRC)
Apprentissage assisté par les pairs (PALS)
Student Team-Achievement Divisions (STAD)
Méthode puzzle
Type de stratégie
Cette stratégie permet de donner une ligne directrice et d’organiser l’ensemble de la démarche d’enseignement-apprentissage. Il s’agit donc d’une macrostratégie qui incorpore la stratégie d’apprentissage coopératif et l’enseignement individualisé. L’ensemble du cycle d’activités de formation s’étend au minimum sur quatre semaines. Elle peut servir pour une année scolaire complète.
Le formateur doit maitriser et incorporer plusieurs microstratégies selon qu’il enseigne à des petits groupes homogènes ou lors d’exposés magistraux dans la classe ou lors de sessions individuelles.
Sulaiman (2016) invite les formateurs à maintenir un haut niveau de motivation des élèves en utilisant des stratégies centrées sur l’apprenant pour ceux qui sont motivés et des stratégies centrées sur le formateur pour des apprenants qui sont moins motivés.
Types de connaissances
L’individualisation assistée par une équipe est particulièrement adaptée pour l’enseignement des mathématiques au niveau primaire. Normalement, la matière correspond aux additions, soustractions, multiplications, numérotations, décimales, fractions, algèbre, etc. Toutefois, cette stratégie a été utilisée dans d’autres champs d’application tels que l’enseignement de la chimie par La Rudi (2017) et de l’apprentissage du vocabulaire de la langue anglaise par Sulaiman (2016).
Cette stratégie contribue à générer différents types de connaissances pour l’apprenant tels que :
- des connaissances factuelles qui sont des connaissances déclaratives dans l'approche Anderson et al(2001). Elles sont développées durant les devoirs à la maison et les travaux d’équipes.
- des connaissances conceptuelles qui sont des connaissances déclaratives complexes dans l'approche d'Anderson et al (2001). Elles sont développées lorsque le formateur regroupe des apprenants homogènes.
- des connaissances procédurales qui sont les connaissances sur « comment réaliser quelque chose » dans l'approche Anderson et al (2001). L’apprenant développe des connaissances des procédures dans un champ des connaissances donné. Dans ce cas-ci, ce sont par exemple des connaissances des algorithmes arithmétiques qui permettent de résoudre des équations.
- des connaissances métacognitives de type savoir-agir qui sont des connaissances sur la cognition en général, ainsi que les connaissances sur ses propres processus cognitifs dans l'approche Anderson et al (2001). Elles sont générées lors de l’apprentissage coopératif qui renforcit la motivation des apprenants en provoquant des liens d’amitié et des interactions positives entre eux.
Description
La classe est divisée en groupes hétérogènes de quatre ou cinq apprenants qui réalisent ensemble une séquence d’apprentissage. Chaque équipier aide son voisin et exerce un contrôle sur la maîtrise de l’activité d’apprentissage. Pour l’enseignement de nouveaux concepts, le formateur regroupe pendant 15 minutes des apprenants qui sont rendus au même niveau. Les apprenants en difficulté sont pris à part pour travailler les points qu’ils ne maitrisent pas. À la fin de l’apprentissage, chaque équipe reçoit un état des réussites de l’équipe en fonction des niveaux réussis par l’ensemble de l’équipe.
En 1983, Slavin a proposé six composantes pour cette stratégie. Les trois dernières ont été ajoutées en 1984 pour compléter l’ensemble des (9) neuf principales composantes.
Composante | Description |
---|---|
Les équipes | La classe se compose de groupes de quatre ou cinq apprenants hétérogènes qui travaillent ensemble sur une séquence d’apprentissage. Les élèves sont affectées à un nouveau groupe toutes les quatre à huit semaines. Chacun des étudiants est responsabilisé et travaille à son propre rythme. |
L’évaluation du rang | Un prétest au début des projets évalue la performance de chacun des apprenants. |
Le matériel du programme | De nombreux outils doivent être mis à la disposition des apprenants en fonction des niveaux de maîtrise de la matière. En fonction de son rang lors du prétest, l’apprenant reçoit un dossier personnalisé composé de plusieurs parties de différents niveaux de difficulté. Ce dossier comprend des instructions, un examen final, des exercices ainsi qu’un correctif. |
L’apprentissage par équipe | Chacun des apprenants commence son apprentissage en fonction de l’évaluation de son rang. Chaque équipier aide son voisin et exerce un contrôle sur l’activité et la maîtrise de ce dernier. |
L’évaluation et la reconnaissance de l’équipe | À la fin de l’apprentissage, chaque équipe reçoit une évaluation des performances en fonction des niveaux réussis par l’ensemble de l’équipe. L’évaluation engendre une responsabilité individuelle, car la réussite de l’équipe dépend des apprentissages individuels et non des productions du groupe. |
Enseignement à des groupes homogènes | Tous les jours, le formateur regroupe des apprenants homogènes provenant de différentes équipes pendant cinq à quinze minutes et leur enseigne de nouvelles connaissances conceptuelles. Les apprenants en difficulté sont pris à part par le formateur pour travailler les points qu’ils ne maitrisent pas. |
Les devoirs | Les apprenants ont un devoir à réaliser tous les jours à part le vendredi. |
Les évaluations factuelles | Le formateur évalue les connaissances factuelles des apprenants deux fois par semaine. Pour se préparer à ses évaluations, les apprenants apportent des feuilles concernant cette matière à la maison. |
L’apprentissage en classe | Toutes les 4 semaines, le formateur enseigne une matière à l’ensemble de la classe. |
Conditions favorisant l’apprentissage
Quelques critères ont été proposés par Slavin (1983) pour améliorer la qualité de l’apprentissage :
- Minimiser le temps du formateur dans la gestion et les corrections
- La moitié du temps du formateur doit être consacré à l’enseignement à des petits groupes
- La simplicité des opérations doit permettre à des apprenants de tout âge de gérer le programme
- Les apprenants doivent être motivés à réaliser correctement et rapidement les exercices sans avoir à tricher ou utiliser des raccourcis.
- Les nombreuses évaluations pour limiter la perte de temps pour l’apprenant à attendre pour de l’aide ou pour accéder à une nouvelle matière.
- Une procédure d’évaluation simple pour permettre aux apprenants de s’évaluer entre eux.
- Le programme doit-être simple et facile à apprendre par les formateurs et les étudiants
- Les apprenants doivent apprendre en coopérant et en faisant partie de groupes hétérogènes.
Niveau d’expertise des apprenants
Cette stratégie favorise l’intégration d’apprenants hétérogènes comportant différents niveaux de performance et d’expertise de la matière. Un matériel doit être facile à utiliser par tous et des évaluations doivent permettre à chacun d’apprendre à son propre rythme.
Des recherches de Slavin (1984) ont démontré l’efficacité de cette stratégie en incorporant des apprenants ayant des troubles d’apprentissages moyens dans des classes normales de mathématiques.
Type de guidage
C’est une activité d’apprentissage coopératif qui fait en sorte que l’apprenant est guidé par ses coéquipiers, par des outils et par l’enseignant.
Rôle des coéquipiers
Le guidage par les pairs est utilisé, car les équipiers aident leurs voisins et exercent un contrôle sur l’activité et la maîtrise de la matière de leurs coéquipiers. Les équipiers corrigent et notent les résultats de leurs voisins. À la fin de l’apprentissage, chaque équipe recevra un état des réussites de l’équipe en fonction des niveaux réussis par l’ensemble de l’équipe. C’est une source de motivation pour les apprenants qui renforce l’esprit d’entraide pour réaliser rapidement et correctement les activités.
Voici 6 étapes d’apprentissage en équipe suggérées par Slavin (1984) :
- L’apprenant choisit un ou deux coéquipiers et détermine la bonne unité d’apprentissage et la propose à l’ensemble de l’équipe. Ce dossier comprend la feuille d’instruction, les feuilles d’habiletés et les vérifications.
- Si ce sont deux coéquipiers, ils s’échangent les feuilles de réponses. Dans les cas d’une équipe de trois, la feuille de réponse va à celui de gauche.
- Chacun des apprenants analyse sa page d’instruction. Il demande de l’aide à ses coéquipiers ou au formateur si nécessaire. L’étudiant commence avec la première feuille d’habiletés.
- L’apprenant résout les 4 premiers problèmes de la feuille d’habileté. Avant de passer à la feuille d’habileté suivante, son coéquipier s’assure de l’exactitude des 4 réponses. Si une seule des 4 réponses est fausse, il doit résoudre les 4 problèmes suivants de cette première feuille d’habiletés. L’apprenant doit avoir 4 bonnes réponses successives avant de passer à une autre feuille d’habileté. À ce stade, il peut demander de l’aide de ces coéquipiers avant de demander l’aide du formateur.
- Quand l’étudiant obtient 4 réponses de bonnes dans la dernière feuille d’habileté, il résout les questions de la feuille Vérification A. Ce sont dix questions portant sur la dernière feuille d’habileté. Un coéquipier vérifie les réponses de la Vérification A et si huit réponses sur dix sont bonnes alors, le coéquipier signe la feuille de vérification. L’apprenant peut poursuivre avec l’examen final. Si l’étudiant obtient moins de huit réponses de bonnes, alors le formateur invite l’apprenant à reprendre certaines pages d’habiletés et ensuite l’apprenant prend la feuille de Vérification B.
- Suite à son approbation, l’apprenant doit aussi demander l’approbation d’un apprenant provenant d’une autre équipe. L’apprenant reçoit et résout le test final. Un étudiant indique le résultat.
Outils utilisés
Toutefois, cette stratégie incorpore aussi un guidage par les outils. Chacun des membres des équipes a un dossier composé de plusieurs parties en fonction des niveaux de la maîtrise de la matière. Cela permet à l’apprenant d’aller à son propre rythme et même de se surpasser. Voici le contenu du dossier des apprenants:
- Une feuille d’instruction explique les habiletés à maitriser et les étapes pour résoudre les problèmes.
- Des feuilles d’habiletés qui incluent 20 problèmes à résoudre. Chacune des feuilles d’habiletés comprend des sous-habiletés nécessaires pour maîtriser l’habileté principale.
- Une vérification qui consiste à deux ensembles de 10 items.
- Le test final.
- Une feuille qui contient les réponses des feuilles d’habiletés, des vérifications et du test final.
Rôle du formateur
L’enseignant doit maitriser la matière et tenir compte des différences dans les habiletés et expertises des apprenants afin d’adapter l’enseignement de la matière. Par ailleurs, beaucoup de préparation est nécessaire pour concevoir la matière et les évaluations.
Aussi, il doit s’assurer de garder les apprenants motivés en permettant un climat positif, en félicitant les membres du groupe pour les actions et attitudes engagées et encourage ceux qui doutent.
Type de regroupement des apprenants
Cette stratégie incorpore plusieurs regroupements.
- Des exposés magistraux ont lieu dans la classe.
- Des petits groupes hétérogènes de 4-5 apprenants réalisent ensemble une séquence d’apprentissage. De nouveaux groupes se reforment après quelques semaines à la suite d’une évaluation des niveaux de chacun des apprenants. Les apprenants sont motivés et ont des chances égales de faire partie d’une « équipe extraordinaire » d’une « super équipe » ou d’une « bonne équipe ». Ces reconnaissances proviennent de critères de performances établis et compilés à la fin de chaque semaine.
- Des petits groupes homogènes sont formés pour transmettre les connaissances conceptuelles.
- Des sessions individuelles sont proposées pour les apprenants qui rencontrent certaines difficultés sporadiques.
Milieu d’intervention
Tout d’abord, cette stratégie est préconisée pour l’enseignement au niveau primaire des mathématiques de la 3e à la 6e année. Des recherches ont démontré des résultats positifs pour l’enseignement de la géométrie 3D par Lia Budi, Tristanti Wiwin et Sri Hidayati (2020) et pour l’enseignement des théories des probabilités par Tinungki Georgina Maria (2015).
Aussi, des recherches ont démontré les avantages de cette stratégie au niveau universitaire dans d’autres domaines tels que dans l’enseignement de cours de chimie de base dans la Faculté de la forêt et en science environnementale de l’Université Halu Oleo par La Rudi (2017).
D’autre part, cette stratégie a été utilisée pour permettre aux apprenants de maitriser le vocabulaire de la langue anglaise au niveau universitaire. Des recherches de Sulaiman (2016) ont démontré l’efficacité de la stratégie dans l’enseignement et l’apprentissage du vocabulaire de la langue anglaise en Indonésie.
Conseils pratiques et exemples d’utilisation
Par son expérience, Sulaiman (2016) invite les formateurs à se préparer. Pour y parvenir, il suggère :
- de comprendre les concepts de cette stratégie ainsi que ses forces et faiblesses, dont le temps requis pour implémenter cette méthode et le temps requis par les apprenants lors des discussions;
- d’analyser la documentation du programme afin de bien planifier les leçons pour couvrir toute la matière et les tests;
- de concevoir un plan des leçons pour faciliter la sélection du matériel et des tests selon le niveau de l’apprenant;
- de s’informer sur cette stratégie via des livres, séminaires, articles et ateliers, etc.
Bibliographie
Adeneye O. A. Awofala, Abayomi A. Arigbabu, Awoyemi A. Awofala (2013) Effects of framing and team assisted individualised instructional strategies on senior secondary high school students’ attitudes toward mathematics Acta Didactica Napocensia, ISSN 2065-1430 Volume 6 Number 1, 2013. Récupéré du site http://dppd.ubbcluj.ro/adn/article_6_1_1.pdf
Anderson, L. W., Krathwohl, D. R., Airasian, P. W., Cruikshank, K. A., Mayer, R. E., Pintrich, P. R., Raths, J., & Wittrock, M. C. (2001). A Taxonomy for learning, teaching, and assessing : A Revision of Bloom’s taxonomy of educational objectives. New York, NY : Longman.
La Rudi (2017) Application of Teaching Model of Team Assisted Individualization [TAI] In Basic Chemistry Courses in Students of Forestry and Science of Environmental Universtias Halu Oleo International Journal of Education and Research Vol. 5 No. 11 November 2017. Récupéré du site https://www.ijern.com/journal/2017/November-2017/07.pdf
Lia Budi Tristanti, Wiwin Sri Hidayati (2020) The implementation of cooperative learning type team assisted individualisation for teaching 3D geometry Journal of Education and Learning (EduLearn) Vol. 14, No. 2, May 2020, pp. 279-288. Récupéré du site https://files.eric.ed.gov/fulltext/EJ1266658.pdf
Slavin, R.E.(1983) Team Assisted Individualization: A Cooperative Learning solution for adaptative instruction in mathematics, Johns Hopkins University, Report no.340. Récupéré du site https://files.eric.ed.gov/fulltext/ED232852.pdf
Slavin, R.E.(1984) Team Assisted Individualization: Cooperative Learning and Individualized Instruction in the Mainstreamed Classroom, RASE Volume 5 Issue 6. Récupéré du site https://zh.booksc.eu/book/26354041/20a523
Slavin, R.E.(2010) L’apprentissage coopératif : pourquoi ça marche ? dans H. Dumont, D. Istance, & F. Benavides (Eds.), Comment apprend-on? La recherche au service de la pratique (pp. 171-189). Paris, France: Éditions OCDE. Récupéré du site http://www.formapex.com/telechargementpublic/slavin2010.pdf?616d13afc6835dd26137b409becc9f87=fbsjtdan
Sulaiman (2016) The Effectiveness of Team Assisted Individualization in Teaching Vocabulary Viewed from Students’ Motivation, Prosiding ICTTE FKIP UNS 2015, Vol 1, Nomor 1, Januari 2016 Récupéré du site https://jurnal.fkip.uns.ac.id/index.php/ictte/article/download/8483/6241
Tinungki Georgina Maria (2015) The Role of Cooperative Learning Type Team Assisted Individualization to Improve the Students’ Mathematics Communication Ability in the Subject of Probability Theory, Journal of Education and Practice Vol.6, No.32. Récupéré du site https://files.eric.ed.gov/fulltext/EJ1083611.pdf
Webographie
Pédagogie Intelligences Multiple :https://www.intelligences-multiples.org/pedagogie-cooperative-avec-intelligences-multiples/
International Journal of Education and Research https://www.ijern.com/
Robert E. Slavin https://en.wikipedia.org/wiki/Robert_Slavin